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lui passant discrètement sa faucille. Il tient à la main une bombe pour les villes sans défense : c’est le raid sur la côte anglaise qui commence. Au loin, sur les plaines qu’il vient de quitter, disparaît la cathédrale de Reims. Et c’est intitulé : la Réelle Triple-Alliance. La même horreur de la barbarie inspire les Alliés dans l’autre hémisphère. Dans le Bulletin, de Sydney, on voit le Kaiser trônant sur un amas de crânes desséchés, comme ceux que Veretschaguine peignait jadis, après la campagne de Plevna, pour inspirer l’horreur de la guerre. Derrière son trône, un squelette géant, armé du fusil et de la bonbonne aux gaz axphyxiants, le protège de son corps hideux. Devant lui, l’Épidémie, décharnée, couverte de pustules, suivie de figures mille et mille fois grossies des bacilles et des microbes, s’incline respectueusement. Et la Maladie dit à l’Empereur : « Salut, maître ! J’en ai tué des dizaines, mais vous en avez tué des milliers ! » Enfin, le Punch, de Melbourne, montre une longue théorie de femmes en deuil, pleurant et priant, que leurs enfants, pendus à leurs voiles noirs, tâchent de consoler, et il intitule cela : « Veuves et orphelins Made in Germany ».

Mais si l’horreur presque physique des cruautés germaniques a inspiré les symboles anglo-saxons, on sent que le coup brutal, tout seul, n’eût pas soulevé la conscience britannique, comme la déloyauté du prétexte, d’abord, et ensuite l’hypocrisie du but : c’est-à-dire le péché contre l’Esprit.