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tesse Anne en se tournant vers le grand-prêtre. Ces inflexions très discrètes suffisent à mettre en communion toutes ces figures et à faire de leur rencontre une « conversation sacrée ». Puis il souriait, en plissant les yeux, d’un sourire un peu pointu. Et cette expression, tout humaine et un peu mondaine chez un être céleste, a toujours intrigué les passants. C’est le mystérieux sourire de celui qui connaît l’autre côté de la vie, les réalités dont toute cette cathédrale est la figuration. Or, cette tête qui souriait est tombée. On l’a ramassée brisée en plusieurs morceaux. Une chose fabriquée par les usines Krupp en a eu raison. Qu’est-ce que M. Krupp donnera au monde en échange ?

L’autre côté du portail a un peu moins souffert. Pourtant, les deux premières figures du fond, près de la porte, où l’on croit voir saint Etienne et un apôtre barbu, sont rabotées par les éclats d’obus, de même que la figure suivante, celle de sainte Eutropie, sœur de saint Nicaise, qui assista à son martyre, et aussi saint Jean, à sa gauche. À côté de saint Jean, à l’entrée du portail, on voit encore une tête coiffée d’une mitre : c’est celle de saint Sixte, premier évêque de Reims ; le reste du personnage est entièrement effacé. Quant à sa voisine, à ce qui fut la Reine de Saba, placée en face de nous sur le contrefort, elle gît dans les gravats et la poussière qui jonchent le sol. C’était une figure simple et fine, droite et souple, dans sa tunique