Page:L'âme russe, contes choisis, trad Golschmann et Jaubert, 1896.djvu/125

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« C’est cela qui sera joli, lorsque Ivan va me dire : mais non, monsieur, non seulement il n’y a pas de bouton, mais le nez lui-même est absent. »

Mais Ivan répondit :

– Il n’y a rien, monsieur, on ne voit aucun bouton sur votre nez.

– C’est bon, cela, que le diable m’emporte ! se dit à part soi le major, en faisant claquer ses doigts.

En ce moment le barbier Ivan Iakovlievitch passa sa tête par la porte timidement, comme un chat qu’on viendrait de fouetter pour avoir volé du lard.

– Dis-moi d’abord : tes mains sont-elles propres ? lui cria Kovaliov en l’apercevant.

– Oui, monsieur.

– Tu mens.

– Par ma foi, elles sont parfaitement propres, monsieur.

– Tu sais, prends garde !

Kovaliov s’assit, Ivan Iakovlievitch lui noua une serviette sous le menton et en un instant, à l’aide du blaireau, lui transforma toute la barbe et une partie des joues en une crème telle qu’on en sert chez les marchands le jour de leur fête.

– Voyez-vous cela, se dit-il, en jetant un coup d’œil sur le nez. Puis il pencha la tête et l’examina de côté :

– Le voilà lui-même en personne… vraiment, quand on y songe… continua-t-il en poursuivant son monologue mental et en attachant un long regard sur le nez.