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Il tenait à loyer une petite maison sur les hauteurs de Montmartre. C’était là qu’aux jours de congé, il conduisait ses élèves. Il s’associait quelquefois un ou deux amis dignes de partager la simplicité de ses goûts, et l’innocence de ses plaisirs. Lorsqu’il était arrivé dans ces lieux, ses yeux et son cœur ne pouvaient se rassasier du tableau touchant que lui offraient la gaîté et le bonheur de ces enfans. Quelquefois il se mêlait à leurs amusemens ; plus souvent on les voyait se presser autour de lui, contemplant ses traits chéris, et dévorant, des yeux, tous ses gestes. Après les jeux, une longue table, servie d’une frugale collation, les rassemblait en famille, et leur père au milieu d’eux. Une concorde parfaite les unissait tous comme des frères ; toutes leurs affections venaient se confondre dans leur amour pour leur maître. L’ordre et la gaîté, le contentement général, cette transmission rapide et silencieuse de la pensée, la vivacité de leur pantomime, le feu de leur conversation, tout donnait à ces repas un charme ineffable.

C’est dans ce lieu d’innocence et de bonheur, qu’au milieu de la joie générale, M. de l’Épée jeta, un jour, sans intention, l’idée de sa mort peut-être prochaine. Soudain un cri déchirant