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disait-on, à Paris. Mille autres circonstances déposent en faveur de l’élève de M. de l’Épée. Vainement une voix intéressée crie à l’imposture ; la cause est portée au Châtelet de Paris, dont la sentence rend au jeune Théodore le titre et les biens du comte de Solar. La famille en appelle. Ne pouvant réussir à faire casser le jugement, on obtient du moins que l’exécution en soit suspendue. Cependant le jeune homme porta le nom de comte de Solar, jusqu’à la mort de M. de l’Épée et du duc de Penthièvre, ce noble appui de tous les malheureux.

Privé de son maître et de son protecteur, le jeune sourd-muet fut ramené de nouveau devant les tribunaux, pour être dépouillé du nom qu’il avait porté et de toutes ses espérances. Sans amis, sans famille, sans fortune, ce malheureux entra dans les rangs de nos braves, malgré son infirmité. « La vue de l’ennemi, se disait-il, sera pour moi le signal de la charge, et je ne veux pas connaître celui de la retraite. » Il ne tarda pas à trouver dans les combats une mort digne du titre qu’il avait perdu. Dans une charge de cavalerie, emporté par son courage, et n’entendant point la trompette qui le rappelle, il tombe frappé de mille coups, au milieu d’un gros d’ennemis qu’il avait percés, jus-