Page:L'Épée-Bébian.- Art d'enseigner aux sourds-muets, 1820.djvu/40

Cette page a été validée par deux contributeurs.

les sinuosités sont bordées de fleurs ; l’autre, au contraire, ne peut être conduit que par une route escarpée ; mais cette route est, en même temps, plus directe et plus sûre. Et ceci, Messieurs, vous paraîtra peut-être digne de quelqu’attention.

Comme dans notre enfance nous sommes réduits à juger de la signification des mots par les circonstances où nous les entendons prononcer[1], si nous rencontrons juste, c’est par hasard ; le plus souvent, nous n’entendons qu’à peu près, et nous nous contentons de cet à peu près, toute notre vie. C’est ensuite sur ces notions si incertaines que s’appuie et s’élève tout l’orgueil de nos connaissances. Nos maîtres ne s’embarrassent point de redresser les erreurs de notre enfance ; et nous-mêmes, dans un âge plus mûr, nous ne nous avisons guère de revenir à ces premières idées, pour en apprécier la justesse et la solidité, et régler avec notre esprit, au moins une fois dans la vie. Aussi faut-il s’étonner si la vie intellectuelle de tant d’hommes ressemble à cet état d’assoupissement qui précède le sommeil, et où la pensée, près de s’évanouir, semble flotter vaguement,

  1. Condillac.