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la scène changea tout-à-coup. Le gentilhomme de Tronka, revenant de la chasse, s’élança dans la cour avec une suite nombreuse de cavaliers, de valets et de chiens. Il demanda qui était cet homme et ce qu’il voulait ; et le châtelain, prenant la parole au milieu des aboiemens répétés de la meute contre l’étranger, raconta de la manière la plus méprisante que c’était Michel Kohlhaas le maquignon qui ne voulait pas reconnaître ses bêtes, et se mettait en rébellion parce qu’elles avaient un peu servi.

« Non, s’écria Kohlhaas, ce ne sont point là les chevaux qui valaient trente écus d’or ; je veux avoir mes chevaux gras et bien portans, tels que je les ai laissés ! »

Le gentilhomme, dont le visage s’était couvert d’une pâleur momentanée, descendit de cheval.