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le chien d’or

naires par un Virgile ou une Béatrice, mais, par une permission divine, il converse avec les bons anges ou les esprits mauvais au séjour du bonheur ou de la désolation.

XVI.

— Vous me surprenez, Kalm, continua le gouverneur, Swedenborg qui était le meilleur mathématicien de la classe et le plus fin observateur de la nature ! Olaf Celsius l’appelait un philosophe éminent, et il méritait ce nom. Il n’était rien moins qu’un fol enthousiaste.

— C’est vrai, mais vous n’ignorez pas, comte, que sous nos neiges et nos glaces, couvent des feux terribles qui font parfois irruption pour illuminer ou dévaster la terre.

Le gouverneur regarda Kalm comme pour l’approuver.

— Je vous reconnais bien, là, dit-il, ô Suédois, avec votre génie brillant et froid comme un soleil d’hiver, votre génie curieux et profond, qui veut soulever le voile dont se couvre l’inconnu et voir ce que nul n’a pu encore deviner ; génie mêlé du mysticisme primitif et charmant d’Edda et de la race d’Odin… Mais quand l’avez-vous rencontré Swedenborg ?

— Je l’ai rencontré à sa résidence de Hornsgata, justement le jour de mon départ. Vous connaissez Hornsgata, près de Stockholm ? Il était au milieu de son verger, dans sa maison d’été, sa retraite favorite. C’est de là qu’il voit les cieux ouverts et qu’il écrit les merveilleux secrets, — Arcana celestia, — dont le monde, un jour, fera ses délices.

— Vous m’étonnez, Kalm ! jamais je n’aurais supposé qu’il se serait consacré à de pareils travaux. Il a donc renoncé à la philosophie pour chercher une nouvelle voie dans la science et la théologie ?… Il est devenu fou à force de sagesse. Peu d’hommes ont cette excuse. Quant à moi j’étudie la philosophie dans les choses visibles, dans une pierre, une plante,