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le chien d’or

leuses, alors que le reste du monde était encore plongé dans les ténèbres de l’ignorance.

— J’ai vu sous les tropiques, reprit de la Corne, les ruines de cités immenses et les temples de dieux étrangers que je ne veux pas appeler des démons,

— Ce ne serait ni philosophique, ni chrétien, répliqua Herr Kalm. Cependant, il est une preuve de l’ancienneté de l’homme rouge de l’Amérique que je trouve concluante, bien que je ne puisse l’apprécier aussi justement que vous. C’est la beauté, la richesse, le charme du langage de ces diverses tribus. Un pareil langage ne peut être que le fruit de la civilisation ; il le prouve, comme le galet, par sa rondeur et son poli, démontre qu’il a été roulé par les flots. Ce ne sont pas les misérables chasseurs que l’on connaît qui ont pu trouver une si splendide manière d’exprimer leurs pensées.

— Leur langage est tellement au-dessus de leur condition, Kalm, affirma de la Corne, qu’il est évident qu’ils descendent d’une race civilisée dont ils ont gaspillé l’héritage et perdu le souvenir.

VIII.

Kalm reprit après un instant.

— L’Amérique est très ancienne, tout le proclame. Ses rochers apparaissaient, quand l’Europe dormait encore sous l’océan. Dernièrement, j’examinais avec étonnement et respect la vieille chaîne des Laurentides, à l’aspect décrépit ; ces assises granitiques qui sont aux autres montagnes du globe, ce que sont les pyramides d’Égypte aux autres monuments de l’homme. Leur aspect vénérable révèle à l’esprit émerveillé une insondable antiquité. Là, nous trouvons, marqués par des coteaux sablonneux les véritables rivages que battirent les eaux de la mer dans les premiers âges du monde. Ces rives premières, les poètes n’ont pu les voir que dans leurs rêves, telles qu’elles apparurent d’abord formant la limite des premières terres qui surgirent de l’Océan universel, au commandement du Créateur.