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le chien d’or

III.

Le travail du conseil était commencé. Le secrétaire avait lu maints documents déjà ; les débats, les discussions suivaient régulièrement et les jugements étaient rendus ou réservés selon les cas.

Le comte avait de la méthode ; il allait vite en affaires, se montrait sans préjugé, franc et décidé. Il était aussi honnête dans le conseil que vaillant sur le gaillard de son vaisseau. L’Intendant montrait presque une égale habileté et une aussi grande connaissance de la politique ; puis il jouissait d’une influence plus considérable à la cour de Louis XV.

Mais il n’avait pas sa franchise, car il lui fallait cacher trop de turpitudes, et tenir l’autorité aussi longtemps que possible.

Avec des caractères, des opinions, des habitudes si contraires, ils ne pouvaient pas s’aimer ; cependant, ils se traitaient avec égards dans le conseil, et avec un certain respect mutuel pour leurs talents.

La plupart des papiers qui se trouvaient sur la table concernaient l’administration intérieure de la Colonie. C’étaient des requêtes du peuple qui se plaignait des exactions des commissaires de l’armée ; des observations au sujet des décrets de l’Intendant ; et des arrêts de la haute Cour de justice déclarant que la grande compagnie avait le droit d’exercer certains nouveaux monopoles.

La discussion était vive. De La Corne St. Luc dénonça vigoureusement les nouvelles ordonnances de l’Intendant, et il fut soutenu par Rigaud de Vaudreuil et le chevalier de Beauharnois. L’Intendant n’essaya point de prouver que ces ordonnances étaient basées sur les principes d’une saine économie, ce qui, du reste, eut été peine perdue, car il avait affaire à des adversaires trop habiles. Il se contenta de sourire et de faire lire, par son secrétaire, les dépêches des ministres de Versailles approuvées par le Roi, dans un lit de justice. Ces dépêches justifiaient tout ce qui avait été fait en faveur de la grande compagnie.