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LE CHIEN D’OR

velles postulantes, au jardin, sous le vieil arbre de la mère Marie de l’Incarnation.

Elle se leva à leur arrivée, les embrassa tendrement et les félicita sur leur pieuse déterminaison.

— Petites enfants prodigues ! dit-elle en souriant, le monde n’est pas fait pour vous. Ses vanités, ses fausses promesses, ses plaisirs menteurs nourrissent mal les âmes ! Vous vous trouverez mieux ici ; vous serez plus près de Dieu !…

— Ô mère ! s’écria Amélie, vous ne savez pas ce que je sacrifie ! non ! vous ne le savez pas ! Mais que le ciel m’aide à souffrir en silence… je ne veux plus, je ne puis plus sortir de la retraite où le crime d’un autre m’a poussée !…

— Ma pauvre enfant ! je sais tout !… Vous alliez épouser le fils du bourgeois… Allons ! consolez-vous !

C’était dit d’une singulière façon. Mère Migeon était la tante de Varin ; elle aimait assez ce vilain neveu, et même, à cause de lui, étendait ses sympathies jusque sur la Grande Compagnie.

Grand’mère St. Pierre reprit aussitôt.

— Vous êtes une bonne enfant, Amélie, une enfant digne de votre race illustre. Des filles comme Héloïse et vous sauvent le monde où elles vivent, et se sauvent dans les cloîtres où elles meurent.

Mère Ste. Hélène embrassa les nouvelles arrivées.

— J’ai enregistré bien des noms aimés dans nos annales, dit-elle, mais aucun, jamais, avec le plaisir que j’éprouve en ce moment… Vous semez dans les pleurs, mes enfants, pour moissonner dans la joie !

— Votre tante s’intitulait l’humble servante de Marie, reprit la mère Supérieure, et la lampe qu’elle a suspendue devant la madone brillera désormais d’un éclat nouveau, par les soins de ses nobles nièces.

VI.

Quelques novices en voile blanc causaient à quelques pas du grand arbre. L’arrivée d’Amélie et d’Hé-