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le chien d’or

pas le supplier de pardonner à Le Gardeur… Je ne puis pardonner moi-même… Mais qu’il soit miséricordieux…

Et maintenant, ajouta-t-elle, d’un accent énergique et fiévreux, maintenant, emportez cette menteuse toilette nuptiale… Je suis la fiancée de la mort !… Ce sont des vêtements de deuil qu’il me faut… qu’il me faut, à moi, la sœur…

Ô mon Dieu ! j’allais dire : la sœur d’un meurtrier.

Elle ramassa les guirlandes de fleurs, les étoffes soyeuses, les dentelles superbes et les jeta dans un coin de la chambre.

— Ma gloire s’est évanouie, reprit-elle, et je suis châtiée dans ma vanité !… Mais c’est pour lui que je voulais être belle !…

Vous donnerez tout cela à quelque douce fiancée qui aura plus d’amour que de richesses, et elle s’en parera, le jour de ses noces, en songeant à l’infortunée Amélie de Repentigny !…

Toutes les jeunes filles la regardaient en pleurant.

Elle ouvrit sa garde-robes.

— Il y a ici depuis longtemps, continua-t-elle encore, un autre voile nuptial… je ne me doutais pas qu’il me servirait !

Elle tira un long voile noir.

— C’est le voile de ma grand’tante, Madeleine de Repentigny, une religieuse. C’est un bien de famille. Je le porterai jusqu’à ma mort… Embrassez-moi, ô mes sœurs ! mes filles d’honneur, mes compagnes ! je m’en vais aux Ursulines, faire pénitence pour Le Gardeur et prier pour mon bien-aimé Pierre !

XIII.

— Ô Amélie, s’écria Hortense, songes-y, réfléchis avant de prendre cette extrême résolution ; Pierre en mourra.

— Pierre ! ah ! je l’ai tué, déjà !… Il est mort pour moi… Comment pourrais-je supporter son regard !… Je mourrais de honte, comme si j’étais vraiment