Page:Kirby - Le chien d'or, tome II, trad LeMay, 1884.djvu/25

Cette page a été validée par deux contributeurs.
25
le chien d’or

pires. Vous devez avoir, dans ce coffret, des fioles d’une meilleure couleur et d’un meilleur bouquet ? Qu’est ceci ?

Elle montrait une petite bouteille rose, d’une forme singulière, cachetée et portant sur son cachet le mystique pentagone. — C’est plus beau et d’un effet aussi sûr peut-être que le lait de miséricorde, remarqua-t-elle ; qu’est-ce que c’est ? La vieille partit d’un rire sardonique et méchant.

V.

— Votre sagesse n’est que folie, Angélique Des Meloises ! répliqua-t-elle ; vous voulez tuer votre rivale et en même temps l’épargner ! C’est le parfum que la Brinvilliers avait apporté au grand bal de l’hôtel de ville. Elle en versa secrètement quelques gouttes sur le mouchoir de la belle Louise Gauthier, et quand Louise Gauthier le respira, quelques moments après, elle s’affaissa sur le parquet. On voulut la relever, elle était morte. Personne ne put deviner comment ni pourquoi ? Elle aimait Gaudin de Ste. Croix, l’amant de la Brinvilliers, comme la dame de Beaumanoir aime l’Intendant que vous aimez aussi.

— Et elle a eu sa récompense ! observa Angélique froidement. J’aurais fait comme la Brinvilliers. Avez-vous autre chose à dire de ce précieux parfum ?

— J’ai à dire qu’il est incomparable. Trois gouttes sur un bouquet de fleurs et celui qui sentira le bouquet s’évanouira pour ne se réveiller que dans l’autre monde. La victime meurt sans souffrir, le sourire sur les lèvres, comme si le baiser d’un ange recueillait son dernier soupir. N’est-ce pas que c’est un baume précieux, mademoiselle ?

— Ô flacon béni ! s’écria Angélique en le portant à ses lèvres, ô flacon béni ! tu seras l’ange qui prendra dans un baiser le dernier soupir de ma rivale ! Elle s’endormira sur des roses !… La Corriveau, préparez sa couche !

— C’est une mort douce, et qui convient à celle