Page:Kirby - Le chien d'or, tome II, trad LeMay, 1884.djvu/235

Cette page a été validée par deux contributeurs.
235
le chien d’or

pâle, ni calme dans sa frayeur, mais tout enflammée. Elle fixait sur son amant ses yeux redoutables qui rendaient fous. Elle avait vu ce qui venait de se passer et se sentait aussi indignée que lui du coup de canne qu’il avait reçu.

De Péan avait jugé le moment venu.

— Angélique, avait-il dit, le bourgeois frappe Le Gardeur ; quelle insulte ! Allez-vous endurer cela ?

— Jamais ! s’était-elle écrié, et Le Gardeur non plus !

C’est alors qu’elle avait poussé son cheval, s’était ouvert un chemin jusqu’à Le Gardeur, et que, lui mettant la main sur l’épaule, elle lui avait parlé d’une voix passionnée.

— Comment, Le Gardeur ! avait-elle dit, vous souffrez qu’un mal va comme ça vous abîme de coups, et vous portez l’épée ?

C’en fut assez. Enivré, fasciné par ce regard et cette parole, Le Gardeur, aurait tué son père.

Il jura qu’il allait se venger sans retard, et, poussant un cri sauvage, agile et fort comme une panthère, il se débarrassa des habitants qui le gênaient, tira son épée et la passa à travers le corps du bourgeois.

Le bon vieillard n’avait pas eu le temps de se mettre en défense. Il tomba mourant, à côté de l’infortuné à qui il venait de faire l’aumône et dont il voulait protéger les jours.

XII.

— Bravo ! Le Gardeur ! exclama de Péan ; c’est le meilleur coup d’épée qui ait jamais été donné dans la Nouvelle-France ! Le Chien d’Or est vaincu et le bourgeois a payé sa dette à la grande compagnie !

Le Gardeur le regarda d’un air étrange :

— Quel est cet homme, de Péan ? Qui ai-je tué ?… demanda-t-il.

— Le bourgeois Philibert, que diable ! répondit de Péan d’un air tout fier.

Le Gardeur poussa un cri rauque :