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le chien d’or

aux obligations de leur ordre ou en discutant les grandes questions de l’époque.

Un mince filet d’eau traversait la place en murmurant. Il serpentait sous les ormes, et hommes et bêtes venaient s’y désaltérer. De chaque côté de cette source limpide, les voitures se rangeaient de bonne heure, les jours de marché.

III.

Le jour de la St. Martin, donc, il y avait foule sur le carré : habitants, gens de la ville, ménagères, servantes ; tous ceux qui avaient quelques denrées à vendre ou quelques provisions à faire.

Une belle occasion, au reste, de rencontrer les amis et les connaissances et de parler de la paix.

Tout le monde semblait à l’aise ; la gaieté animait toutes les figures.

Le marché était abondamment fourni. Ici des pommes de la côte Beaupré, tout imprégnées des senteurs du miel, des poires de l’Ange Gardien, du raisin de l’Île d’Orléans, l’Île de Bacchus, aux riants coteaux ; là, le gibier de toutes sortes : les oies, les outardes, les canards tués sur les battures de la canardière ou de l’Île aux grues, à leur arrivée de la baie d’Hudson.

C’était sur ces malheureux oiseaux de passage que les chasseurs dirigeaient les coups, maintenant qu’ils ne pouvaient plus tirer sur le Bostonnais ou sur l’Anglais.

Il y avait des amas de truites prises dans les petits lacs et les rivières de Montmorency ; de saumons magnifiques et d’anguilles grosses comme le bras du pécheur qui les avait tirées de l’eau. Il y avait des sacs de grain, moulu au moulin banal, des tinettes de beurre jaune comme de l’or, l’orgueil des ménagères de Beauport et de Lauzon, qui ne cessaient de crier à leurs marmots quand ils demandaient des beurrées : mes enfants, ménagez le beurre !