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le chien d’or

V.

Le bonheur d’Amélie était parfait ce jour-là. Le Gardeur lui avait écrit un mot pour lui demander pardon et il était vraisemblable qu’il allait s’échapper du palais pour reprendre son rang de gentilhomme et sa liberté.

Il avait entendu parler de son mariage avec Philibert et il la félicitait chaleureusement et envoyait mille bénédictions à son ami.

Elle montra la lettre à Pierre qui fut tout-à-fait touché.

Dans cette heureuse disposition d’âme, tout lui paraissait plus doux et plus beau : les buissons alignés comme une frange grise sur le bord du ruisseau, la brise qui roulait le feuillage sec, le flot où se mirait le ciel bleu. Et comme un écho à leurs voix émues qui parlaient d’amour, un bruit vague, léger, mystérieux, montait de partout.

Quelques oiseaux attardés, perchés sur les branches nues des cenelliers, jetaient, de moment en moment, une note plaintive, comme un soupir triste, comme un regret. On eut dit qu’ils pleuraient les jours chauds de l’été sitôt enfuis.

VI.

Au détour du ruisseau, ils aperçurent, de l’autre bord, quelques fleurs assez brillantes : Amélie s’assit sur un tronc d’arbre, et Pierre traversa l’eau pour en cueillir.

— Lesquelles voulez-vous ? demanda-t-il.

— Les nénuphars blancs, d’autres aussi… toutes ! Je veux les mettre devant Notre-Dame des Victoires. Ma tante et moi nous avons fait un vœu, et il nous faut l’accomplir demain.

— Un vœu ! je tiens à payer ma part, acceptez-vous ?

— Oui, mais à la condition que vous ne me demandiez pas quel est ce vœu. Revenez, maintenant, ajouta-t-elle, vous en avez plus que nous ne pourrons en emporter.