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le chien d’or

V.

— Garçon, demanda-t-il au groom, est-ce qu’il y a longtemps que l’Intendant est ici ?

— Depuis le midi, répondit le groom en se découvrant poliment.

— Et est-il toujours resté comme cela dans la fenêtre avec mademoiselle Angélique ?

— Je n’en sais rien, monsieur. Je n’ai pas d’yeux pour épier mes maîtres.

— Oh ! oh ! fit de Péan, et il se rangea pour n’être pas vu.

— Le chevalier de Péan s’exerce à la patience, reprit Angélique, et vous lui faites l’occasion belle, Excellence !

— Désirez-vous que je parte ? demanda Bigot en se levant

— Bah ! laissez-le faire ; il attendra là aussi longtemps que je voudrai.

— Ou bien que je resterai ici. C’est un amoureux commode, qui fera un mari plus commode encore, dit Bigot

Angélique lui darda un regard menaçant. Elle ne pouvait souffrir qu’on lui parlât d’aimer cet homme.

— Eh bien, chevalier, dit-elle, si vous êtes obligé de partir, partez !

Mais laissez-moi refaire le nœud de votre cravate.

Elle approcha ses doigts de fée de la cravate qui se défaisait

— Ce nœud est comme l’amour, reprit-elle en riant, il a besoin d’être éprouvé.

VI.

Bigot ne répondit rien. Il songeait à Caroline de St. Castin. Un jour, sur les rivages du Bassin des Minés, elle aussi avait refait de ses doigt tremblants le nœud fatal de cette cravate, et c’est alors qu’elle trahit le doux secret de son cœur.

Angélique devina ce qui se passait dans l’âme de