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le chien d’or

VI.

Le bourgeois reprit :

— Bonne dame Rochelle ! vous allez rajeunir pour vivre maintenant avec Pierre et Amélie. Ils veulent que vous habitiez avec eux. Amélie a bien pleuré quand je lui ai raconté votre navrante histoire.

Dame Rochelle laissa tomber ses yeux pleins de larmes sur la robe de deuil qui lui rappelait de si lamentables et si lointains souvenirs.

— Merci, maître ! dit-elle, merci ! Avec ces chers enfants, mes derniers jours seraient sans doute des jours de bénédiction ; mais je veux rester avec vous, car vous aussi vous avez pleuré, et vous connaissez les douleurs de la vie.

— Je vous comprends, dame Rochelle, mais voici que mon âme s’éveille à la joie et que le souvenir des jours mauvais s’efface devant la clarté d’un jour nouveau. Mes yeux n’auront plus de larmes maintenant, et ma bouche va sourire toujours ! Le bonheur m’inonde ! Nous allons tous ensemble retourner dans notre vieux château de Normandie.

Dame Rochelle fit un bond en joignant les mains.

— Que dites-vous là, maître ! nous allons retourner en France ?… Ah ! je pourrai donc reposer près de lui, dans la verdoyante vallée de la Côte d’or !

— Je ferai pour Pierre, continua le bourgeois, ce que je n’aurais jamais fait pour moi-même : je le réinstallerai dans le château de ses pères et obtiendrai qu’on lui rende les titres et les honneurs de sa famille. N’est-ce pas là un magnifique couronnement à ma carrière ?

VII.

Ô maître ! répliqua dame Rochelle, ce beau rêve s’accomplira-t-il ?… Laisserez-vous jamais la colonie ? Vous êtes aimé ici, mais vous êtes haï. Ceux qui vous aiment voudront vous garder au milieu d’eux, et ceux qui vous haïssent désireront votre mort ! Vous-même, pourrez-vous vous éloigner de