IV.
Chrétien, il se réjouissait de la paix qui rayonnait de nouveau sur le monde ; citoyen, il était heureux de voir le territoire national intact, la patrie sauvée ! père, il songeait à racheter pour son fils, les riches domaines que l’injustice et la jalousie lui avaient enlevés en Europe.
Il songeait à les racheter, car il avait de l’or et il n’aimait pas les recours à la justice, même pour revendiquer ses droits méconnus.
Ses agents à Paris avaient ordre de tout racheter, à n’importe quel prix. Ces domaines avec le château seraient le cadeau de noce des jeunes époux.
V.
Après avoir longtemps rêvé à ces choses, le bourgeois leva la tête et regarda dame Rochelle.
Dame Rochelle ajusta ses lunettes et ferma son livre.
— Pierre est-il de retour ? demanda-t-il.
— Non, maître ; il m’a prié de vous dire qu’il est allé à Lorette avec mademoiselle Amélie.
— Ah ! je suppose qu’Amélie a fait quelque vœu à Notre-Dame de Lorette et qu’il veut prendre sa part de l’obligation ! Cela promet, n’est-ce pas, dame Rochelle ?
Et il se mit à rire candidement, complaisamment, comme il avait coutume de faire.
Dame Rochelle se releva un peu comme pour parler plus facilement :
— Pierre et Amélie sont dignes l’un de l’autre, fit-elle ; il n’y a pas, en dehors du ciel, de couples mieux assortis. S’ils ont fait des vœux à Notre-Dame de Lorette, ils les accompliront fidèlement, comme s’ils les avaient faits au Seigneur lui-même.
La bonne vieille huguenote ne se serait pas montrée si accommodante s’il ne se fut agi de Pierre et d’Amélie.