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le chien d’or

de carême ! Nous avons, jusqu’à présent, beurré notre pain des deux côtés, mais bientôt, j’en ai peur, nous n’aurons plus de pain à manger avec notre beurre. Il nous faudra ronger vos décrets.

— Mes décrets !… Il y a des gens qui menacent de nous manger aujourd’hui, qui les ont trouvés difficiles à digérer, mes décrets !

Voyez donc, Cadet, ce paquet de bons payables au Chien d’Or !

Quand cela finira-t-il ? ajouta-t-il avec une recrudescence de colère.

Et il repoussa les billets.

Ce Philibert gagne du terrain chaque jour ! Le voilà qui achète les bons de l’armée et les mandats des officiers, pour la moitié de l’escompte exigé par la grande compagnie.

— Rendez-les donc au commis, ces damnés bons ! et qu’il s’en aille au plus vite ! ordonna-t-il à de Péan.

V.

Le commis, si peu gracieusement éconduit tout à l’heure, attendait patiemment dans l’antichambre.

De Péan alla aussitôt, en faisant une grimace qui n’indiquait pas une soumission absolue, lui remettre les papiers.

Il faut que cela finisse ! reprit l’Intendant, et ça va finir… ! Le chien d’or entasse, dans ses coffres, tout l’argent de la colonie, et si on ne l’enchaîne pas, il va, au premier beau jour, tuer le crédit de la grande compagnie.

À méchant chien court lien ! dit le proverbe, et je crois que le proverbe a raison, riposta Cadet.

Le chien d’or a commencé par aboyer après nous ; maintenant, par Dieu ! il nous mord ! Bientôt il va nous ronger les os, comme l’indique cette maudite enseigne de la rue Buade.

— Que feriez-vous, Cadet ?

— Je le pendrais… comme un chien !

— Mais il a tant d’amis dans la colonie… sans