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le chien d’or

ton maître, — les compliments du sieur Cadet ! — et dis-lui que j’espère bien qu’il viendra lui-même, la prochaine fois, apporter sa nouvelle fournée. Dis-lui aussi que des fenêtres de la Friponne, on peut faire un joli saut.

— Au contraire, sieur Cadet ! j’avertirai mon maître de ne pas se montrer ici, et je reviendrai moi-même, avant trois jours, j’en suis sûr, présenter à la signature de Son Excellence une masse de nouveaux billets…

— Sortez ! imbécile ! cria Cadet tout en riant de la ténacité du commis. Vous êtes digne de votre maître.

Et il le poussa dehors et ferma la porte avec tant de violence que le choc fut entendu dans tout le palais.

IV.

— Ne lui gardez pas rancune, Bigot, reprit-il, il n’en vaut pas la peine. Tel maître, tel valet ! comme dit le proverbe. Après tout, je ne sais pas trop si le Parlement de Paris ne donnerait pas raison au chien d’or contre nous.

Bigot rageait. Il voyait que Cadet avait raison. Il appelait mille malédictions sur la tête des honnêtes gens, sur le gouverneur, sur le commandant des Forces. Il n’épargnait pas davantage la Pompadour sa protectrice. C’était elle qui avait intrigué pour faire conclure le traité de paix. Elle voulait, la jalouse, garder le roi près d’elle, à Paris… Elle préférait les plaisirs à l’honneur, et l’argent aux plaisirs.

— La grande compagnie, s’écria-t-il, en relevant la tête dans un mouvement de dégoût, la grande compagnie paie les violons des fêtes royales de Versailles, pendant que le bourgeois lui enlève le trafic de la Nouvelle- France !

Cette paix inopportune va doubler la richesse et l’influence du chien d’or.

— Bigot, riposta Cadet, en lançant une bouffée de fumée odorante, vous ressemblez à un prédicateur