Ce n’est pas vous qui l’avez tuée, je le sais : donc, c’est elle.
Est-ce assez logique ?
— Mais comment le crime a-t-il été perpétré, Cadet ? Elle n’a pu l’exécuter elle-même.
— Alors elle s’est servie de la main d’un autre. Voici la preuve.
Il tira de sa poche le morceau de papier qu’il avait ramassé dans la chambre secrète.
— Est-ce l’écriture d’Angélique, demanda-t-il ?
Bigot saisit vivement le chiffon de papier et se mit à l’examiner avec attention, cherchant quelle main avait coutume d’écrire ainsi. Il ne put trouver.
— Ce n’est pas l’écriture d’Angélique, fit-il… Je ne la connais pas du tout… Et pourtant, j’ai des lettres de presque toutes les dames de Québec !
Dans tous les cas, plus d’une main a trempé dans le meurtre de Caroline. Il y a eu complot. Voyez, les infâmes se sont ménagé une entrevue avec leur malheureuse victime. Le papier est déchiré, mais voici ce qu’on peut lire encore :
« À la porte cintrée, vers minuit. Si vous voulez me recevoir, je vous révélerai des choses importantes ; des choses qui vous regardent vous-même, qui regardent l’Intendant et le baron de St. Castin qui arrive dans la colonie. »
Voilà quelque chose qui jette de la lumière sur le mystère, Cadet. Une femme devait avoir une entrevue avec Caroline, à minuit. Bon Dieu ! Cadet ! pas deux heures avant notre arrivée !… Et nous avons retardé notre départ afin de mieux filouter le seigneur de Portneuf !… Trop tard ! trop tard ! Maudite idée, qui nous est venue de retarder !… La Providence se joue de nous, Cadet ! Elle se moque de nous !…
III.
Il regarda de nouveau le lambeau de lettre :
— Le baron de St. Castin qui arrive, lut-il encore. Personne, excepté les conseillers du gouverneur, ne devait connaître ce fait. Et ils sont sous serment !