Page:Kirby - Le chien d'or, tome II, trad LeMay, 1884.djvu/176

Cette page a été validée par deux contributeurs.
176
le chien d’or

Menut. Il avait souri, quand les convives avaient parlé d’elle comme de la future maîtresse du château. Le château ! il venait de s’évanouir dans les flots de mélodie qui montaient vers la voûte sainte !… il venait de s’évanouir avec l’ange mortel qui dormait son dernier sommeil, dans sa robe blanche ensanglantée, sous les dalles froides de la chambre secrète !…

Elle oubliait tout, dans ce concert divin de la charité et de la foi ; mais elle ne se repentait point !

Des pensées plus futiles encore suivirent. Elle s’imagina être dans ce banc superbe, parée de la plus riche toilette, les cheveux arrangés d’une façon adorable… Tout le monde se détournerait de l’autel pour la regarder, pour l’admirer ou la jalouser.

Mais cela arriverait-il ?… Et quand ?… Elle avait perdu son âme pour gagner le monde… Ne perdrait-elle pas et le monde et son âme ?…

XV.

Bigot n’était pas dans son banc. L’inquiétude, les soucis, la colère, le rendaient malade et le clouaient sur son lit. Il se mettait l’esprit à la torture pour inventer une vengeance contre l’auteur de l’attentat, s’il parvenait à le découvrir, et plus il cherchait moins il trouvait. Le rocher qu’il soulevait lui retombait sur la tête…

Le gouverneur et son ami Kalm occupaient le banc royal. Kalm, bien que Luthérien, avait assez, de philosophie et d’amour de Dieu, pour se joindre volontiers à tous les hommes de bonne volonté qui prient.

Tout près d’Angélique, deux femmes vêtues de noir étaient prosternées sur le parquet ; c’étaient madame de Tilly et Amélie de Repentigny.

Elles étaient revenues à la ville immédiatement après le départ de Le Gardeur. Angélique le savait, de sorte qu’elle ne fut pas étonnée de les retrouver dans l’église.