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le chien d’or

Fanchon, qui répondait de son mieux, fut toute étonnée de cette brusquerie, et elle se hâta d’ajouter :

— C’est tout ! madame, c’est tout ! Ils sont sortis aussitôt.

X.

Angélique respira. Elle pensa que l’Intendant n’aurait pas manqué de faire part à de Péan de sa lugubre découverte, s’il avait connu l’assassinat de Caroline.

Elle comprit aussi qu’il ne pouvait accuser personne sans se compromettre, et sans passer pour un menteur et un fourbe auprès du roi et de la Pompadour.

— Je dirai que je ne connais rien de cette affaire… je le jurerai s’il le faut, pensa-t-elle encore, et il n’osera pas aller plus loin.

Rassurée, calme, elle descendit l’escalier. Le garçon tenait le cheval à la porte, depuis longtemps. Elle ramassa sa longue amazone neuve et monta en selle avec une grâce et une légèreté remarquables.

— Attendez-moi, dit-elle au groom.

Elle descendit la rue St. Louis. Tous les yeux la suivaient avec envie. Près du monastère des récollets, elle aperçut le sieur La Force, qui guettait, au coin de la rue Ste Anne, les pensionnaires des Ursulines. La Force la vit au même instant et fut d’opinion qu’elle valait bien une pensionnaire.

Il la salua avec une politesse toute parisienne et sollicita l’honneur de l’accompagner.

— Je voudrais faire une jalouse, dit-il, en regardant la porte du couvent qui s’ouvrait pour laisser sortir un essaim de charmantes élèves.

— Et vous croyez que je puis vous aider ?

— J’ai une petite vengeance à exercer, et personne ne répand la terreur dans les âmes tendres comme Angélique Des Meloises. On la sait toute puissante et invincible.

— Alors venez ; prenez votre cheval. J’éprouve justement le besoin de torturer quelqu’un ce matin.