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le chien d’or

Joséphine du lac Beauport… Je sais bien que tout est vanité ; mais tout de même, en ce temps-là, mes yeux et mes dents avaient de la renommée !…

— Le lac Beauport n’a rien eu de pareil depuis lors, reprit l’Intendant… Mais, chut ! pas un mot de plus, si vous voulez me faire plaisir, et bonne nuit !

— Bonne nuit, Excellence !

Cadet, pensa-t-elle, ne s’occupe pas des femmes ; il ne mérite pas qu’on s’occupe de lui.

XIII.

Elle entra dans sa chambre, se plaça devant son miroir pour se regarder les dents, et se mit à prendre des poses comme une jeune fille coquette.

Bigot demanda à Cadet de l’attendre dans l’antichambre, et il se dirigea vers la chambre secrète.

Il descendit l’escalier et frappa à la porte, en appelant d’une voix basse et douce :

Caroline ! Caroline !

Nul ne répondit. Il s’étonna, car elle avait coutume d’accourir à sa voix.

Il frappa plus fort ; il appela.

Hélas ! il aurait pu frapper et appeler éternellement ! La voix qu’il aimait tant était à jamais muette.

Il soupçonna un malheur, poussa la porte et entra. La chambre était pleine de lumière, et sur le parquet gisait une forme blanche.

Il ne vit que cela. Les yeux de la morte regardaient comme regardent les morts. Une de ses mains pressait sa poitrine, l’autre, étendue sur le tapis, tenait encore quelques feuilles du fatal bouquet.

XIV.

Bigot demeura stupéfait, épouvanté. Un instant après, il se laissa choir sur ses genoux, auprès du cadavre, en poussant un cri d’angoisse. Il crut d’abord qu’elle n’était qu’évanouie. Il lui toucha le front, les lèvres, les mains ; il voulut écouter battre son cœur et son cœur ne battait plus. Il lui souleva