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le chien d’or

naît. Heureux celui qui a la foi pour appui, à ce moment où les amitiés de la terre ne peuvent plus le soutenir ! Heureux celui qui meurt dans la charité, car la charité est une lampe divine qui éclaire l’âme dans son vol vers les cieux.

VI.

La Corriveau demeura penchée sur le cadavre de sa victime pour examiner les effets de l’aqua tofana.

C’était la première fois qu’elle osait administrer le subtil poison de la Borgia.

L’aqua tofana agit comme un charme, murmura-t-elle. C’est Béatrice Spara qui l’a composée… Je l’aime mieux que son stylet… J’ai été folle de me servir de cet instrument… Je me suis souillé les mains de sang.

Elle s’essuya, et ses doigts firent une empreinte rouge sur la robe blanche.

VII.

La cloche du château sonna un coup. Il était une heure.

Sa voix solitaire semblait, dans la maison endormie, une voix accusatrice. Mais personne ne s’éveilla pour chercher l’auteur du forfait qui venait de s’accomplir.

La Corriveau l’entendit et se leva. Sa tâche était finie.

Elle fit avec une jalouse curiosité le tour de la chambre secrète, et remarqua la richesse des meubles et des décorations. Elle aperçut sa lettre sur une chaise, la saisit fiévreusement, la déchira et en jeta les morceaux sur le parquet. Elle s’en repentit aussitôt, les ramassa, et les mit dans son coffret, avec le bouquet de roses qu’elle arracha des mains du cadavre.

Elle voulait le jeter dans le bois.

Elle ouvrit un écritoire dans l’espoir d’y trouver de l’argent ; mais il n’y en avait point. Elle n’eut pas le temps de chercher ailleurs.