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le chien d’or

la forêt et les montagnes voisines, le son argentin se répercuta mélancoliquement.

La Corriveau sortit du bois, longea la haie du côté de l’ombre et entra dans la tour.

Elle se trouva dans une chambre carrée, obscure comme une caverne. Un rayon de lune, descendant par la fenêtre grillée, la traversait d’un bout à l’autre.

Elle s’assit sur une pierre pour se reposer un peu et se recueillir. Elle avait besoin de toute sa prudence et de toute sa force pour l’œuvre qui allait se consommer.

Les chiens hurlaient d’une façon lugubre, comme s’ils avaient deviné l’infernale machination. Elle n’en avait point peur, car ils étaient enfermés dans la cour du château.

V.

— Me voici rendue saine et sauve, pensa-t-elle. Personne ne m’a vue !…

On dit qu’il y a un œil qui voit tout, une oreille qui entend tout. Si Dieu me voit et m’entend, il ne m’empêche toujours pas d’accomplir mes desseins. Cette nuit encore, je veux agir, et toutes les prières de la victime désignée ne serviront de rien… Si Dieu existe, il me laisse vivre et il laisse périr la dame de Beaumanoir !…

Il y avait, dans un coin de la tour, un escalier de pierre tournant, qui montait jusqu’au toit et descendait jusqu’aux voûtes.

Ces voûtes épaisses avaient servi de magasins autrefois, quand les habitants du château, à l’approche des Iroquois, venaient s’enfermer dans la tour.

Après un moment de repos, la Corriveau, comme impatientée d’en avoir fini, passa sous une porte cintrée qu’elle avait observée dans l’ombre et se trouva sur un palier du grand escalier.

— C’est par là, murmura-t-elle. De la lumière maintenant !