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le chien d’or

VIII.

La table était bien servie, et les mets plus succulents que ne l’aurait fait supposer l’aspect misérable du taudis. Le pot de confitures, apporté par l’infidèle servante de Varin, n’avait pas été oublié.

Les deux vieilles compagnes s’assirent en face l’une de l’autre.

La Corriveau eut une pensée infernale qui fit tressaillir les mânes de Béatrice Spara, d’Exili et de la La Voisin. Elle sourit en elle-même et se dit que la prudence était une chose d’un prix infini.

Il y avait entre les deux vieilles femmes, au milieu de la table, une bouteille d’eau de vie. Et les deux misérables buvaient, riaient, se moquaient de leurs dupes et de leurs victimes, et chantaient des refrains obscènes.

IX.

Le lendemain, la Corriveau fit connaître à mademoiselle Des Meloises son intention de visiter Beaumanoir le soir même.

Angélique éprouva de la joie à cette nouvelle, mais en même temps, elle pâlit et frissonna. C’était la peur que la tentative ne réussit pas ou que le crime fut découvert.

Elle envoya porter, à la chaumière de la mère Malheur, par un inconnu, un bouquet de roses magnifiques enfermées dans un coffret. Elle avait tremblé en cueillant ces fleurs dignes de parer l’autel de l’Agneau.

La Corriveau plaça le coffret dans une petite chambre noire, où le soleil n’entrait jamais, et dont la sale fenêtre s’ouvrait sur le rocher, à deux pas.

Elle l’ouvrit et ses petits yeux méchants lançaient des flammes à la vue des roses parfumées attachées avec un ruban bleu, et d’une bourse de soie pleine de pièces d’or.