Page:Kirby - Le chien d'or, tome II, trad LeMay, 1884.djvu/120

Cette page a été validée par deux contributeurs.
120
le chien d’or

— Vous êtes plus chanceuse que moi ! je vais quelquefois le prier aussi à l’église, et je ne le vois jamais.

Et les deux vieilles maudites se prirent à ricaner, en répétant les litanies du diable qu’elles récitaient dans l’église de Dieu.

VII.

Il s’agit maintenant, observa la Corriveau, de décider comment je me rendrai à Beaumanoir. Il me faudra aller à pied, comme vous avez fait, mère Malheur. Je prendrai le sentier qui traverse la forêt. Il faut que je ne sois pas vue. Il y va de ma vie.

— La lune se lève vers neuf heures, répondit mère Malheur, ce sera le moment d’entrer dans les bois. Êtes-vous sûre du chemin ?

— Le chemin ? J’y entre comme dans ma robe ! Je connais un canotier sauvage qui me débarquera sur la batture de Beauport et ne soufflera mot. Je n’irai pas m’exposer à l’espionnage de maître Jean Le Nocher ou de sa Babet.

— Ma parole d’honneur ! dame Dodier, vous êtes malaisée, à prendre et vous seriez capable de jouer à cache-cache avec Satan.

Pourtant, ajouta-t-elle cyniquement, je crois qu’il finira par nous trouver… quand nous serons dans notre dernière cachette.

— Bah ! vogue la galère ! exclama la Corriveau en se levant. Ça ira comme ça pourra !

Je me rendrai à Beaumanoir sur mes jambes, et pour trouver le chemin plus court et moins fatiguant ; je m’imaginerai que je porte des jarretières d’or et des pantoufles d’argent.

Mais vous devez avoir faim, mère Malheur, après une aussi longue marche. Je vous ai préparé un bon souper. Venez manger au nom du diable, ou bien je vais dire le bénédicité pour vous faire étouffer.