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répandus par les grandes invasions mon­trent un type tout particulier, d’une perfection peu commune, même quand ils s’inspirent de modèles d’origine romaine. L’émigration vers l’Empire romain civilisé mit partout fin à cette indus­trie indigène, sauf en Angleterre. Les agrafes de bronze, par exemple, montrent com­bien cette industrie s’était uniformément créée et perfectionnée ; celles qui ont été trouvées en Bourgogne, en Roumanie, sur la mer d’Azov pourraient être sorties du même atelier que les agrafes anglaises et suédoises et sont aussi indubitablement d’origine germanique.

La constitution, elle aussi, correspond au stade supérieur de la barbarie. D’après Tacite, le conseil des chefs (principes) existait partout, décidait des affaires les moins importantes, mais préparait les affaires les plus importantes pour la décision par l’assemblée du peuple ; celle-ci même n’existe, au stade inférieur de la barbarie, du moins chez les Américains où nous la connaissons, que pour la gens, pas encore pour la tribu ou pour la confédération de tribus. Les chefs (principes) se différencient encore très nettement des commandants militaires (duces), tout comme chez les Iroquois. Les premiers vivent déjà en partie de dons honorifiques, bétail, grain, etc., que leur offrent les membres de la tribu ; tout comme en Amérique, ils sont pres­que toujours élus dans la même famille ; le passage au droit paternel favorise, comme en Grèce et à Rome, la transformation progressive de l’élection en hérédité et, du même coup, la constitution d’une famille noble dans chaque gens. Cette antique nobles­se, dite de tribu, dispa­rut la plupart du temps pendant les grandes invasions ou bientôt après. Les comman­dants militaires étaient élus, sans considération d’origine, sur leurs seules capacités. Ils avaient peu de pouvoir et devaient agir par l’exemple. Tacite attribue expressé­ment aux prê­tres le véritable pouvoir disciplinaire dans l’armée. Le pouvoir réel appartenait à l’assemblée du peuple. Le roi ou chef de tribu préside ; le peuple décide — non : par des mur­mu­res ; oui : par des acclamations et le bruit des armes. C’est en même temps une assemblée de justice : c’est devant elle qu’on porte plainte et qu’on juge, qu’on prononce des condamna­tions à mort ; la peine capitale n’est d’ailleurs prévue que pour des crimes de lâcheté, de trahison envers le peuple et de vices contre nature. Dans les gentes aussi, et dans leurs subdivisions,