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ANALYTIQUE DU JUGEMENT TÉLÉOLOGIQUE.

nature, et prendre pour une fin de la nature l’existence de cette chose. Dans ce dernier cas, nous n’avons pas seulement besoin du concept d’une fin possible, mais de la connaissance du but final (scopus) de la nature, lequel implique une relation de la nature à quelque chose de supra-sensible, qui dépasse de beaucoup toute notre connaissance téléologique de la nature ; car le but de l’existence de la nature même doit être cherché en dehors de la nature. La forme intérieure d'un simple brin d’herbe prouve, suffisamment pour notre humaine faculté de juger, qu’il n’a pu être produit que d’après la règle des fins. Mais si l’on s’écarte de là, si on ne voit que l’usage qu’en font d’autres êtres de la nature, et si, abandonnant ainsi la considération de l’organisation intérieure , on ne considère que les relations extérieures de finalité, comme la nécessité de l’herbe pour les bestiaux, celle des bestiaux pour l’homme, et qu’on ne voie pas pourquoi il est nécessaire qu’il y ait des hommes (question qui surtout quand on songe aux habitants de la Nouvelle Hollande ou à ceux du Tropique, ne serait pas si facile à résoudre), on n’arrive point alors à une fin catégorique, mais toute cette relation de finalité repose sur une condition qu’on recule toujours et qui, en tant qu’inconditionnelle (existence d’une chose comme but final), repose tout à fait en de- hors de la considération physico-téléologique du