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CRITIQUE DU JUGEMENT TÉLÉOLOGIQUE.


lière existant hors de moi dans l’objet. Mais, comme cette considération exige déjà un usage critique de la raison, et, par conséquent, n’est pas tout d’abord impliquée dans le jugement que nous portons sur l’objet d’après ses propriétés, ce jugement ne me donne immédiatement que l’union de règles hétérogènes (même en ce qu’elles ont d’hétérogène) en un principe, dont je puis reconnaître la vérité a priori, sans avoir besoin d’un principe particulier reposant a priori en dehors de mon concept et en général de ma représentation. Or l’étonnement vient de ce que l’esprit est arrêté par l’incompatibilité d’une représentation et de la règle donnée par cette représentation avec les principes qui lui servent déjà de fondement, et par là est conduit à douter s’il a bien vu ou jugé ; mais l’admiration est un étonnement qui ne cesse jamais, même après la disparition de ce doute. Par conséquent, l’admiration est un effet tout naturel de cette finalité que nous observons dans l’essence des choses (considérées comme phénomènes), et on ne peut la blâmer, car non-seulement il nous est impossible d’expliquer pourquoi l’union de cette forme de l’intuition sensible {qui s’appelle l’espace) avec la faculté des concepts (l’entendement) est précisément telle et non pas une autre ; mais cette union même étend l’esprit en lui faisant comme pressentir quelque chose encore qui repose au-dessus de ces représenta-