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DIALECTIQUE TRANSCENDENTALE


et la froide affirmation de l’autre, pourquoi l’on applaudit avec joie à la première, tandis que l’on se montre irrévocablement prévenu contre la seconde.

Mais il y a quelque chose qui, dans cette appréciation provisoire, détermine le seul point de vue d’où l’on puisse l’établir d’une manière suffisamment solide ; je veux parler de la comparaison des principes d’où partent les deux parties. On remarque entre les affirmations de l’antithèse une parfaite uniformité de pensée et une complète unité de maximes, c’est-à-dire un principe de pur empirisme, qui sert non-seulement à expliquer les phénomènes dans le monde, mais encore à résoudre les idées transcendentales touchant l'univers même. Au contraire, les affirmations de la thèse prennent pour fondement, outre le mode d’explication empirique employé dans le cours de la série des phénomènes, certains principes intellectuels, et, en ce sens, la maxime n’en est pas simple. Je la désignerai, d’après son caractère essentiellement distinctif, sous le nom de dogmatisme de la raison pure.

Du côté du dogmatisme, dans la détermination des idées cosmologiques de la raison, ou du côté de la thèse, on trouve donc :

En premier lieu, un certain intérêt pratique, auquel prend part de bon cœur tout homme sensé qui comprend son véritable avantage. Que le monde ait un commencement, que mon moi pensant soit d’une nature simple et partant incorruptible, qu’il soit en même temps libre dans ses actions volontaires et qu’il échappe à la contrainte de la nature, qu’enfin l’ordre entier des choses qui constituent le monde dérive d’un être premier, duquel tout emprunte son unité et son harmonie ; ce sont là autant de pierres fondamentales de la morale et de