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TROISIÈME ANTINOMIE


triction dans toute son universalité, et il est impossible d’admettre cette sorte de causalité comme la seule.

D’après cela, il faut admettre une causalité par laquelle quelque chose arrive, sans que la cause en soit déterminée aussi par une autre cause antérieure, suivant des lois nécessaires, c’est-à-dire une spontanéité absolue des causes ayant la vertu de commencer par elle-même une série de phénomènes, qui se déroule suivant des lois naturelles, par conséquent une liberté transcendentale, sans laquelle, même dans le cours de la nature, la série des phénomènes ne serait jamais complète du côté des causes.

chaînement et l’ordre des événements du monde. La liberté (l’indépendance) à l’égard des lois de la nature affranchit, il est vrai, de la contrainte, mais elle affranchit aussi du fil conducteur de toutes les règles. En effet, on ne peut pas dire que des lois de la liberté prennent dans la causalité du cours du monde la place des lois de la nature, puisque, si la liberté était déterminée par des lois, elle ne serait plus de la liberté, mais la nature même. Il y a donc entre la nature et la liberté transcendentale la même différence qu’entre la soumission à des lois[1] et l’affranchissement de toutes lois[2]. La première, il est vrai, importune l’entendement de la difficulté de remonter toujours plus haut dans la série des causes pour y chercher l’origine des événements, puisque la causalité y est toujours conditionnelle ; mais elle promet en revanche une unité d’expérience universelle et régulière. L’illusion de la liberté, au contraire, offre bien à l’entendement un repos dans son investigation à travers la chaîne des causes, en la conduisant à une causalité
  1. Gesetzndszigkeit.
  2. Gesetzlorigkeit.