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DIALECTIQUE TRANSCENDENTALE


sion. Ce même monde s’appelle nature *[1], en tant qu’il est considéré comme un tout dynamique ; on n’a point d’égard ici à l’agrégation dans l’espace ou dans le temps, pour l’envisager comme une quantité, mais à l’unité dans l’existence des phénomènes. Or, comme on appelle cause la condition de ce qui arrive, et liberté, la causalité absolue de la cause dans le phénomène, la cause conditionnelle se nomme, au contraire, cause naturelle dans le sens étroit du mot. Le conditionnel dans l’existence en général s’appelle contingent, et l’inconditionnel, nécessaire. La nécessité inconditionnelle des phénomènes peut être appelée nécessité naturelle.

J’ai nommé idées cosmologiques les idées dont nous nous occupons maintenant, en partie parce que l’on comprend sous le mot monde l’ensemble de tous les phénomènes, et que nos idées ne poursuivent l’inconditionnel que parmi les phénomènes, en partie parce que, dans son sens transcendental, ce mot signifie l’absolue totalité de l’ensemble des choses existantes, et que nous avons uniquement en vue la perfection de la synthèse (bien que nous ne l’envisagions proprement que dans sa régression vers les conditions). Si l’on considère qu’en outre ces idées sont toutes transcendantes, et que, bien qu’elles ne dépassent pas l’objet, c’est-à-dire les phénomènes, quant

  1. * La nature, prise adjectivement (formalither), signifie l’assemblage des déterminations d’une chose opérée suivant un principe interne de la causalité. Au contraire on entend par nature, prise substantivement (materialiter), l’ensemble des phénomènes, en tant qu’ils sont tous unis en vertu d’un principe interne de la causalité. Dans le premier sens on parle de la nature de la matière fluide, du feu, etc., et l’on ne se sert de ce mot qu’adjectivement ; au contraire, quand on parle des choses de la nature, on pense à un tout subsistant.