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CRITIQUE DE LA RAISON PURE (Ire ÉDITION)


cientes dont le caractère ne s’accorde plus avec les effets qu’elles produisent en nous, parce qu’il se rapporte simplement aux sens extérieurs, tandis que ces effets se rapportent au sens interne, et que ces deux sens, bien que réunis en un sujet, sont cependant tout à fait hétérogènes. Nous n’avons plus alors d’autres effets extérieurs que des changements de lieu, et d’autres forces que des efforts aboutissant à des rapports dans l’espace comme à leurs effets. En nous, au contraire, les effets sont des pensées parmi lesquelles on ne trouve point de rapport de lien, point de mouvement, de figuré ou de détermination d’espace en général, et nous perdons entièrement le fil conducteur des causes aux effets qui en devraient résulter dans le sens interne. Mais nous devrions songer que les corps ne sont pas des objets en soi, qui nous soient présents, mais une simple manifestation 1[1] de je ne sais quel objet inconnu ; que le mouvement n’est pas l’effet de cette cause inconnue, mais seulement la manifestation de leur influence sur nos sens ; que, par conséquent, ni les corps, ni leur mouvement ne sont quelque chose hors de nous, mais de simples représentations en nous ; qu’ainsi ce n’est pas le mouvement de la matière qui produit en nous des représentations, mais qu’il n’est lui-même (et par conséquent aussi la matière, qui se fait connaître par là) qu’une simple représentation, et qu’enfin toute la difficulté, qui s’offre ici d’elle-même, revient à savoir comment et par quelles causes les représentations de notre sensibilité sont liées entre elles de telle sorte que celles que nous nommons des intuitions extérieures puissent être représentées suivant des lois empiriques, comme des objets hors de nous, question qui n’implique pas du tout la prétendue difficulté d’expliquer l’origine des représentations de causes efficientes existant hors de nous et tout à fait hétérogènes, car cette difficulté n’a lieu que quand nous prenons les manifestations d’une cause inconnue pour la cause hors de nous, ce qui ne peut produire que de la confusion. Lorsque des jugements contiennent un malentendu enraciné par une longue habitude, il est impossible de les rectifier avec cette clarté qu’on est en droit d’exiger dans d’autres cas où le concept

  1. 1 Eine blosse Erscheinung.