Page:Kant - Critique de la raison pure, II.djvu/464

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
450
CRITIQUE DE LA RAISON PURE (Ire ÉDITION)



Critique du quatrième paralogisme de la psychologie transcendentale.



Soumettons d’abord à l’examen les prémisses de ce raisonnement. Nous pouvons affirmer avec raison qu’il n’y a que ce qui est en nous qui puisse être immédiatement perçu, et que seule ma propre existence peut être l’objet d’une simple perception. L’existence d’un objet réel en dehors de moi (en prenant ce mot dans le sens intellectuel) n’est donc jamais donnée directement dans la perception ; mais ce n’est jamais que par rapport à cette perception, qui est une modification du sens intime, qu’elle peut être conçue, et par conséquent conclue, comme cause extérieure de cette modification. Aussi Descartes avait-il raison de restreindre toute perception dans le sens le plus étroit à la proposition : je suis (comme être pensant). Il est clair en effet que, comme l’extérieur n’est pas en moi, je ne puis le trouver dans mon aperception, ni par conséquent dans aucune perception, la perception n’étant proprement que la détermination de l’aperception.

Je ne puis donc pas proprement percevoir les objets extérieurs, mais seulement conclure de ma perception interne à leur existence, en regardant cette perception comme l’effet dont quelque chose d’extérieur est la cause la plus prochaine. Or il est toujours incertain de conclure d’un effet donné à une cause déterminée ; car l’effet peut résulter de plus d’une cause. Dans le rapport de la perception à sa cause il reste donc toujours douteux si cette cause est intérieure ou extérieure, si par conséquent toutes les prétendues perceptions extérieures ne sont pas un simple jeu de notre sens intérieur, ou si elles se rapportent à des objets réellement extérieurs comme à leur cause. Du moins l’existence de ces objets n’est-elle que conclue, et court-elle le danger de toutes les conclusions, tandis qu’au contraire l’objet du sens intérieur (moi-même avec toutes mes représentations) est immédiatement perçu et que l’existence n’en souffre aucun doute.

Sous le nom d’idéaliste il ne faut donc pas entendre celui qui nie l’existence des objets extérieurs des sens, mais celui seule-