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DÉDUCTION DES CONCEPTS PURS DE L’ENTENDEMENT

à l’entendement peuvent être effectués par le rapport des éléments divers à l’unité de l’aperception.

Il y a donc en nous une imagination pore, comme faculté fondamentale de l’âme humaine servant à priori de principe à toute connaissance : Au moyen de cette faculté, d’une part nous relions les éléments divers de l’intuition, et d’autre part nous les rattachons à la condition de l’unité nécessaire de l’aperception pure. Les deux termes extrêmes, la sensibilité et l’entendement, doivent nécessairement s’accorder au moyen de cette fonction transcendantale de l’imagination, puisqu’autrement il y aurait bien des phénomènes, mais point d’objets d’une connaissance empirique, par conséquent point d’expérience. L’expérience réelle, qui se compose de l’appréhension, de l’association (de la reproduction), enfin de la récognition des phénomènes, contient, dans cette dernière et suprême condition (des éléments purement empiriques de l’expérience), certains concepts qui rendent possible l’unité formelle de l’expérience et avec elle toute valeur objective (toute vérité) de la connaissance empirique. Ces principes de la récognition du divers, en tant qu’ils ne concernent que la forme d’une science en général, sont nos catégories. C’est donc sur celles-ci que se fonde toute unité formelle dans la synthèse de l’imagination, et, par le moyen de cette synthèse, l’unité de tout usage empirique de cette faculté (dans la récognition, la reproduction, l’association, l’appréhension) jusqu’aux phénomènes, puisque ceux-ci ne peuvent appartenir à la connaissance et en général à notre conscience, par conséquent à nous-mêmes, qu’au moyen de ces éléments.

C’est donc nous-mêmes qui introduisons l’ordre et la régularité dans les phénomènes que nous appelons nature, et nous ne pourrions les y trouver s’ils n’y avaient été mis originairement par nous ou par la nature de notre esprit. En effet cette unité de la nature doit être une unité nécessaire, c’est-à-dire certaine à priori, de l’enchaînement des phénomènes. Mais comment pourrions-nous mettre en avant à priori une unité synthétique, si, dans les sources originaires d’où dérive la connaissance de notre esprit, il n’y avait des principes subjectifs de cette unité à priori, et si ces conditions subjectives n’avaient pas en même temps une valeur objective, puisqu’elles sont les principes de la possi-