Page:Kant - Critique de la raison pure, II.djvu/420

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
406
MÉTHODOLOGIE TRANSCENDENTALE




CHAPITRE QUATRIÈME


Histoire de la raison pure


Ce titre n’est placé ici que pour désigner une lacune qui reste dans le système, et qui devra être remplie plus tard. Je me contente de jeter un rapide coup d’œil, d’un point de vue purement transcendental, c’est-à-dire du point de vue de la nature de la raison pure, sur l’ensemble des travaux qu’elle a faits jusqu’ici, et qui me représentent sans doute un édifice, mais un édifice en ruines.

Il est assez remarquable, bien que cela ne pût naturellement arriver d’une autre manière, que les hommes, dans l’enfance de la philosophie, aient commencé par où nous finirions plutôt maintenant, c’est-à-dire par étudier la connaissance de Dieu et l’espérance ou même la nature d’un autre monde. Quelque grossières que fussent les idées religieuses introduites par les anciens usages que les peuples avaient conservés de leur état de barbarie, cela n’empêcha pas la partie la plus éclairée de se livrer à de libres recherches sur ce sujet, et l’on comprît aisément qu’il ne peut y avoir de manière plus solide et plus certaine de plaire à la puissance invisible qui gouverne le monde et d’être ainsi heureux, au moins dans une autre vie, que la bonne conduite. La théologie et la morale furent donc les deux mobiles ou plutôt les deux points d’aboutissement pour toutes les recherches auxquelles on ne cessa de se livrer par la suite. Toute-