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MÉTHODOLOGIE TRANSCENDENTALE


sique de la raison pure, renferme deux divisions : la physique rationnelle *[1] et la psychologie rationnelle.

L’idée originaire d’une philosophie de la raison pure prescrit cette division ; celle-ci est donc architectonique, conforme aux fins essentielles de la raison, et non pas seulement technique, établie d’après des affinités accidentellement perçues et tracée en quelque sorte au hasard ; et c’est pourquoi elle est immuable et législative. Mais il y a ici quelques points qui pourraient exciter des doutes et infirmer la conviction touchant sa légitimité.

D’abord, comment puis-je attendre une connaissance à priori, par conséquent une métaphysique, d’objets qui sont donnés à nos sens, c’est-à-dire à posteriori ? Et comment est-il possible de connaître, suivant des principes à priori, la nature des choses, et d’arriver à une physiologie rationnelle ? La réponse est que nous ne prenons de l’expérience que tout juste ce qui est nécessaire pour nous donner un objet, soit du sens extérieur, soit du sens intérieur, le premier au moyen du simple concept de matière (étendue sans vie et impénétrable), le second au moyen du concept d’un être pensant (dans la

  1. * Qu’on ne pense pas que j’entende par là ce qu’on nomme ordinairement la physique générale (physica generalis), laquelle est plutôt la mathématique que la philosophie de la nature. En effet la métaphysique de la nature se distingue complètement de la mathématique ; et si elle est loin d’avoir à offrir des vues aussi étendues que celle-ci, elle n’en est pas moins très-importante par rapport à la critique de la connaissance purement intellectuelle en général dans son application à la nature. Faute de cette métaphysique, les mathématiciens eux-mêmes, en s’attachant à certains concepts vulgaires, mais métaphysiques en réalité, ont, sans s’en apercevoir, chargé la physique d’hypothèses, qui s’évanouissent devant une critique de ces principes, sans pourtant faire le moindre tort à l’usage des mathématiques dans ce champ (usage qui est tout à fait indispensable).