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DIALECTIQUE TRANSCENDENTALE


car alors il pourrait bien n’être qu’un simple phénomène pour moi qui pense, mais non pas en tant que je pense. Dans la conscience que j’ai de moi-même avec la pure pensée, je suis l’être même ; il est vrai que par là rien de cet être ne m’est encore donné à penser.

Mais, si la proposition : je pense, signifie : j’existe pensant, elle n’est plus une fonction purement logique ; elle détermine le sujet (lequel est en même temps objet) par rapport à l’existence, et elle ne saurait avoir lieu sans le sens intérieur, dont l’intuition ne donne jamais l’objet comme chose en soi, mais simplement comme phénomène. Dans cette proposition, il n’y a donc plus seulement spontanéité de pensée, il y a en outre réceptivité d’intuition, c’est-à-dire que la pensée de moi-même est appliquée à l’intuition empirique du même sujet. Or c’est dans cette dernière que le moi pensant devrait chercher les conditions de l’application de ses fonctions logiques aux catégories de la substance, de la cause, etc., pour pouvoir, non-seulement se qualifier soi-même par le moi comme un objet en soi, mais encore déterminer le mode de son existence, c’est-à-dire se connaître comme noumène. Mais cela est impossible, puisque l’intuition empirique intérieure est sensible et ne fournit autre chose que les données du phénomène, lesquelles n’apportent à l’objet de la conscience pure rien qui fasse connaître son existence séparée ; elle ne peut servir qu’à l’expérience.

Supposez que nous trouvions plus tard, non pas dans l’expérience, mais dans certaines lois de l’usage de la raison pure, établies à priori, et concernant notre existence (je ne parle pas, par conséquent, de règles purement logiques), une occasion de nous supposer tout à fait à priori dictant des lois à notre propre existence et