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L’OPINION, LE SAVOIR ET LA FOI


même sous ce rapport théorétique, que je crois à un Dieu ; mais alors cette foi n’est cependant pas pratique dans le sens strict, et elle doit être appelée une foi doctrinale, que la théologie de la nature (physico-théologie) doit nécessairement produire partout. En se plaçant au point de vue de cette sagesse, et en considérant les excellentes qualités de la nature humaine et la brièveté de la vie si peu appropriée à ces qualités, on peut aussi trouver une raison suffisante en faveur d’une foi doctrinale à la vie future de l’âme humaine.

Le mot foi est en pareil cas une expression modeste au point de vue objectif, mais qui annonce en même temps une ferme connaissance au point de vue subjectif. Si je qualifiais ici de légitime hypothèse le jugement purement théorétique, je ferais entendre par là que j’ai de la nature d’une cause du monde et d’une autre vie un concept que je ne puis réellement montrer ; car il faut au moins que je connaisse assez les propriétés de ce que j’admets comme hypothèse, pour n’avoir pas besoin d’en imaginer le concept, mais seulement l’existence. Mais le mot foi ne regarde que la direction qui m’est donnée par une idée, et l’influence subjective qu’elle exerce sur le développement des actes de ma raison et qui me fortifie dans cette idée, bien que je ne sois pas en état d’en rendre compte au point de vue spéculatif.

Mais la foi purement doctrinale a en soi quelque chose de vacillant ; on en est souvent éloigné par les difficultés qui se présentent dans la spéculation, bien que l’on y revienne toujours infailliblement.

Il en est tout autrement de la foi morale. C’est qu’il est en ce cas absolument nécessaire que quelque chose soit fait,


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