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DISCIPLINE DE LA RAISON PURE


tives qui permettent à notre raison de comprendre 1[1], et cela n’est pas un motif pour rejeter la chose même (c’est ainsi, par exemple, que la nécessité absolue dans l’existence d’un être ne peut nullement être comprise par nous, et que par conséquent cette impossibilité s’oppose justement, au point de vue subjectif, à toute preuve spéculative d’un être suprême nécessaire, mais s’oppose à tort à la possibilité d’un tel être en soi) ; — ou bien les deux parties, tant celle qui affirme que celle qui nie, trompées par l’apparence transcendentale, prennent pour fondement un concept impossible d’objet, et c’est alors le cas d’appliquer la règle : non entis nulla sunt prædicata, c’est-à-dire que ce que l’on affirme et ce que l’on nie de l’objet est également faux, et que l’on ne saurait arriver apagogiquement à la connaissance de la vérité par la réfutation du contraire. Ainsi, par exemple, si l’on suppose que le monde sensible est donné en soi, quant à sa totalité, il est faux qu’il soit ou bien infini dans l’espace, ou bien fini et borné, car les deux choses sont fausses. En effet des phénomènes (comme simples représentations), qui seraient cependant donnés en soi, (comme objets), sont quelque chose d’impossible, et l’infinité de ce tout imaginaire serait, il est vrai, inconditionnelle, mais (puisque tout est conditionnel dans les phénomènes) elle serait en contradiction avec la détermination inconditionnelle de la quantité, qui est cependant supposée dans le concept.

La preuve apagogique est aussi le vrai prestige qui retient toujours ceux qui admirent la solidité de nos rai-

  1. 1 Mit den subjectiven Bedingungen der Begreiflichkeit durch unsere Vernunft.