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DIALECTIQUE TRANSCENDENTALE


seulement comme objet en idée, et non en réalité, c’est-à-dire uniquement en tant qu’il est pour nous un substratum inconnu de cette unité systématique, de cet ordre et de cette finalité de la constitution du monde dont la raison doit se faire un principe régulateur dans son investigation de la nature. Bien plus, nous pouvons dans cette idée accorder hardiment et sans crainte de blâme un certain anthropomorphisme, qui est nécessaire au principe régulateur dont il s’agit ici. En effet ce n’est toujours qu’une idée, qui n’est pas directement rapportée à un être distinct du monde, mais au principe régulateur de l’unité systématique du monde, ce qui ne peut avoir lieu qu’au moyen d’un schème de cette unité, c’est-à-dire d’une intelligence suprême qui en soit la cause suivant de sages desseins. On ne saurait concevoir par là ce qu’est en soi le principe de l’unité du monde, mais comment nous devons l’employer, ou plutôt employer son idée relativement à l’usage systématique de la raison par rapport aux choses du monde.

Mais de cette manière pouvons-nous (continuera-t-on de demander) admettre un unique, sage et tout-puissant auteur du monde ? Sans aucun doute ; et non-seulement nous pouvons, mais nous devons le supposer. Mais alors étendons-nous notre connaissance au delà du champ de l’expérience possible ? Nullement. En effet nous n’avons fait que supposer un quelque chose dont aucun concept ne nous fait connaître la nature en soi (un objet purement transcendental) ; mais, par rapport à l’ordre systématique et final de la construction du monde, que nous devons supposer quand nous étudions la nature, nous n’avons conçu cet être, qui nous est inconnu, que par analogie avec une intelligence (dont le concept est empi-