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DU BUT FINAL DE LA DIALECTIQUE NATURELLE


telle cause intelligente suprême. En effet, si l’on ne peut supposer à priori dans la nature la finalité suprême, c’est-à-dire comme appartenant à l’essence de la nature, comment veut-on être conduit à la chercher et s’approcher, au moyen de cette échelle, de la suprême perfection d’un premier auteur, comme d’une perfection absolument nécessaire et par conséquent pouvant être connue à priori ? Le principe régulateur veut que l’on présuppose absolument, c’est-à-dire comme résultant de la nature des choses, l’unité systématique comme une unité naturelle, qui ne peut pas être connue d’une manière purement empirique, mais qui est supposée à priori, bien que d’une manière encore indéterminée. Que si je commence par poser en principe un être ordonnateur suprême, l’unité de la nature est alors supprimée par le fait. Car elle devient ainsi tout à fait étrangère à la nature des choses et contingente, et elle ne peut plus être connue au moyen des lois générales de cette nature. De là un cercle vicieux dans la démonstration, puisque l’on suppose ce qu’il s’agissait précisément de démontrer.

Prendre le principe régulateur de l’unité systématique de la nature pour un principe constitutif, et admettre hypostatiquement comme cause première ce qui n’est pris qu’en idée pour fondement de l’usage uniforme de la raison, c’est là ce qui s’appelle proprement égarer la raison. L’investigation de la nature va son chemin en suivant uniquement la chaîne des causes naturelles qui sont soumises aux lois générales de la nature ; et, si elle a recours à l’idée d’un auteur suprême, ce n’est pas pour en dériver la finalité, qu’elle poursuit partout, mais pour en connaître l’existence au moyen de cette finalité qu’elle cherche dans l’essence des choses de la nature, et même au-