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DIALECTIQUE TRANSCENDENTALE


tel concept, en un mot tout ce qui seul permet de dire que ce concept a un sens.

La seconde idée régulatrice de la raison purement spéculative est le concept du monde en général. En effet la nature n’est proprement que l’unique objet donné par rapport auquel la raison a besoin de principes régulateurs. Cette nature est de deux espèces : pensante ou corporelle. Mais pour concevoir la dernière dans sa possibilité interne, c’est-à-dire pour déterminer l’application des catégories à cette nature, nous n’avons besoin d’aucune idée, c’est-à-dire d’aucune représentation qui dépasse l’expérience ; aussi bien n’y en a-t-il point de possible par rapport à elle, puisque nous ne sommes guidés à son égard que par l’intuition sensible et qu’il n’en va pas ici comme dans le concept psychologique fondamental (moi), lequel contient à priori une certaine forme de la pensée, à savoir l’unité de la pensée. Il ne nous reste donc rien pour la raison pure que la nature en général et la plénitude en elle des conditions d’après quelque principe. L’absolue totalité des séries de ces conditions, dans la dérivation de leurs membres, est une idée qui, à la vérité, ne peut jamais être complètement réalisée dans l’usage empirique de la raison, mais qui cependant nous fournit la règle que nous devons suivre à cet égard. C’est-à-dire que, dans l’explication des phénomènes donnés, nous devons procéder (en rétrogradant ou en remontant), comme si la série était en soi infinie (c’est-à-dire in indefinitum) ; mais que, là, où la raison même est considérée comme cause déterminante (dans la liberté), par conséquent dans les principes pratiques, nous devons agir comme si nous avions devant nous, non pas un objet des sens, mais