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DIALECTIQUE TRANSCENDENTALE


objet, aucun sens qui détermine quelque autre objet. Ils peuvent donc bien servir à l’explication de la possibilité des choses dans le monde sensible, mais non pas à celle de la possibilité d’un univers même, puisque ce principe d’explication devrait être en dehors du monde, et que par conséquent il ne saurait être un objet d’expérience possible. Je puis cependant admettre, relativement au monde sensible, mais non en soi, un être incompréhensible de ce genre, l’objet d’une simple idée. En effet, si une idée (celle de l’unité systématiquement parfaite, dont je parlerai bientôt d’une manière plus précise) sert de fondement au plus grand usage empirique possible de ma raison, et que cette idée ne puisse jamais être en soi représentée d’une manière adéquate dans l’expérience, bien qu’elle soit indispensablement nécessaire pour rapprocher l’unité empirique du plus haut degré possible ; je ne suis pas alors seulement autorisé, mais obligé à réaliser cette idée, c’est-à-dire à lui supposer un objet réel, mais seulement comme quelque chose en général que je ne connais pas du tout en soi et auquel je ne donne des propriétés analogues aux concepts de l’entendement dans son usage empirique que comme à un principe de cette unité systématique et relativement à elle. Je concevrai donc, par analogie aux réalités du monde, aux substances, à la causalité et à la nécessité, un être qui possède tout cela dans la suprême perfection ; et, puisque cette idée ne repose que sur ma raison, je pourrai concevoir cet être comme une raison indépendante, qui soit la cause de l’univers au moyen des idées de la plus grande harmonie et de la plus grande unité possible. J’élimine ainsi toutes les conditions qui limitent l’idée, uniquement afin de rendre possible, grâce à un tel principe, l’unité systéma-