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DIALECTIQUE TRANSCENDENTALE

Ainsi ce fameux argument se résout en un paralogisme. C’est ce que l’on comprendra clairement, si l’on veut bien se reporter à la remarque générale sur lare présentation systématique des principes et à la section des noumènes, où il a été prouvé que le concept d’une chose, qui peut exister en soi comme sujet et non pas seulement comme prédicat, n’emporte avec lui aucune réalité objective ; c’est-à-dire qu’il est impossible de savoir si quelque objet y correspond, puisqu’on n’aperçoit pas la possibilité d’un tel mode d’existence, et que par conséquent nous n’en avons absolument aucune connaissance. Pour que ce concept désigne, sous le nom de substance, un objet qui puisse être donné, pour qu’il devienne une connaissance, il faut donc qu’il ait pour fondement une intuition constante, ce qui est la condition indispensable de la réalité objective de tout concept et ce par quoi seulement un objet est donné. Or dans l’intuition intérieure nous n’avons rien de fixe, puisque le Je n’est que la conscience de ma pensée. Si donc nous nous en tenons à la pensée, nous sommes privés de la condition nécessaire pour appliquer au moi comme être pensant le concept de la substance, c’est-à-dire d’un être existant en soi, et la simplicité inhérente à la substance

    cience de soi, et par conséquent il n’y a plus ici d’objet conçu, mais on se représente seulement le rapport à soi comme à un sujet (en tant que ce rapport est la forme de la pensée). Dans la première, il s’agit des choses qui ne peuvent être conçues autrement que comme sujets ; dans la seconde au contraire, il ne s’agit plus des choses, mais (puisque l’on fait abstraction de tout objet) de la pensée, dans laquelle le je sert toujours de sujet de conscience. On ne saurait donc en déduire cette conclusion : je ne puis exister autrement que comme sujet, mais celle-ci seulement : je ne puis dans la pensée de mon existence me servir de moi que comme d’un sujet du jugement, ce qui est une proposition identique, qui ne révèle absolument rien sur le mode de mon existence.