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DIALECTIQUE TRANSCENDENTALE


principe constitutif, mais seulement d’un principe régulateur. En effet, de ce que nous posons une chose correspondant à l’idée, un quelque chose, ou un être réel, il ne s’ensuit pas que nous voulions étendre notre connaissance des choses au moyen de concepts transcendentaux ; car cet être n’est pris pour fondement qu’en idée et non en soi, et par conséquent uniquement pour exprimer l’unité systématique qui doit nous servir de règle dans l’usage empirique de la raison, sans que nous puissions rien décider sur le principe de cette unité ou sur la nature intime de l’être qui en est la cause et le fondement.

Le concept transcendental et le seul déterminé que nous donne de Dieu la raison purement spéculative est donc, dans le sens le plus étroit, un concept déiste. La raison, en effet, ne nous donne pas même la valeur objective de ce concept, mais seulement l’idée de quelque chose sur quoi toute réalité empirique fonde sa suprême et nécessaire unité ; et nous ne pouvons le concevoir que par analogie à une substance réelle qui serait, suivant des lois rationnelles, la cause de toutes choses, quand nous entreprenons de le concevoir absolument comme un objet particulier, et que nous n’aimons pas mieux, nous contentant de la simple idée du principe régulateur de la raison, laisser de côté, comme surpassant l’entendement humain, l’achèvement de toutes les conditions de la pensée, ce qui d’ailleurs ne peut s’accorder avec le but d’une parfaite unité systématique dans notre connaissance, à laquelle du moins la raison ne met pas de bornes.

Il arrive ainsi qu’en admettant un être divin, je n’ai pas à la vérité le moindre concept de la possibilité interne de sa souveraine perfection, ni de la nécessité de