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DE L’USAGE RÉGULATEUR DES IDÉES


n’a lieu. Les principes de la raison pure au contraire ne peuvent jamais être constitutifs par rapport aux concepts empiriques, parce qu’aucun schème correspondant de la sensibilité ne peut leur être donné, et que par conséquent ils ne peuvent avoir aucun objet in concreto. Mais si je renonce à me servir empiriquement de ces principes comme de principes constitutifs, comment puis-je vouloir cependant leur assurer un usage régulateur, et avec cet usage quelque valeur objective, et quel sens peut-il avoir ?

L’entendement fait pour la raison précisément ce que la sensibilité fait pour l’entendement. L’œuvre de la raison est de constituer systématiquement l’unité de tous les actes empiriques possibles de l’entendement, de même que celle de l’entendement est de relier par des concepts et de soumettre à des lois empiriques la diversité des phénomènes. Et de même que les actes de l’entendement, sans les schèmes de la sensibilité, sont indéterminés, de même l’unité de la raison, par rapport aux conditions sous lesquelles l’entendement doit unir systématiquement ses concepts et au degré où il doit le faire, est indéterminée par elle-même. Mais, bien qu’on ne puisse trouver dans l’intuition aucun schème pour l’unité systématique complète de tous les concepts de l’entendement, l’analogue d’un schème de ce genre peut et doit être donné, et cet analogue est l’idée du maximum de la division de la connaissance intellectuelle et de son union en un seul principe. En effet le plus grand et l’absolument parfait peuvent se concevoir d’une manière déterminée, puisque toutes les conditions restrictives qui donnent une diversité indéterminée sont écartées. L’idée de la raison est donc l’analogue d’un schème de la sensibilité, mais avec cette différence que l’application des concepts de l’en-